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2 mai 2010 7 02 /05 /mai /2010 23:24

Zurich-1er-Mai pics 809Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Soupirs de désolation, peine et consternation tellement nous étions peu nombreux lors de ce sinistre premier mai. Cortège étriqué à outrance dans les rues de Paris, 60 000 gueux au mieux sous la grisaille et la mitraille des flashs touristiques : il faut croire que nous continuons d’apparaître so french, et finalement si pittoresques.  Ça traînait des pieds et des gueules, dans la tranchée funeste du boulevard Saint-Martin, armée défaite avant d’avoir véritablement combattu. Ce n’était pourtant pas faute d’avoir été prévenus : la réforme des retraites  — euphémisme sirupeux qu’on serait bien inspiré de traduire par « nouvelle offensive dans la guerre de destruction massive que mène le capitalisme contre le genre humain », merde faut appeler un rat un rat ! —, la réforme des retraites, donc, on va se la manger grave et en pleine trombine, à la rentrée prochaine. L’inénarrable Raymond Soubie, conseiller écouté du maître du Château, l’a clairement claironné dès le premier mai au soir : ladite réforme « ne sera pas un chemin de roses », a indiqué celui qui, en matière de casse sociale, fait office de grand vizir. Et d’enchaîner comme il se doit sur « des chiffres en net retrait par rapport aux manifestations précédentes », preuve selon lui qu’ « une large partie des Français considèrent qu’une réforme est inéluctable. » Vu comme ça, c’est évident... Cependant, à force de n’écouter, selon la formule de Villepin, que les gens qui ne défilent pas, on fini par devenir sourd. Le risque est alors, pour l’Iznogoud, de ne rien entendre venir et de se retrouver un jour quelque peu étonné par une populace qui n’a que faire de ses brioches. Pour l’heure, rien qu’à l‘idée du bon sommeil qu’a procuré aux Sarkozy, aux Fillon et autres Soubie ce premier mai raté dans les grandes largeurs, l’autruche en perdrait (presque) le sien. Elle le perd définitivement lorsque Thibault de la cégète parle, lui, de « participation honorable. » Ce que le déni de réalité peut parfois vous pousser à dire… Et son pote Chérèque de renchérir : « il ne faut jamais faire du premier mai un test social. » Ah bon. Ah oui ? Nul doute, dans ce cas, que l’autruche ne prendra pas la peine de s’extirper de son douillet nid, le premier mai prochain.

 

     Et tandis que de ce côté de la Méditerranée on avale couleuvres et boas destructors comme autant d’orvets d’élevage, la Grèce, elle, a un train d’avance, jetée sans ménagement dans la fosse à serpents. En signant un accord avec le Fmi c’est sa perte qu’elle signe, bien sûr. Mise en coupe réglée comme, fut un temps, l’Argentine — mais ce n’est jamais qu’un exemple —, elle vient de s’offrir la pelle avec laquelle il faudra bien qu’elle creuse sa propre tombe. Une fois de plus est démontré, s’il en était besoin, que l’histoire du racket mondial a beau se répéter cela ne sert à rien puisque les Etats, quels qu’ils soient, sont définitivement dépourvus de mémoire. Fort heureusement, les peuples en ont. Aussi n’est-il pas certains que les Grecs acceptent sans broncher les « sacrifices durs, mais nécessaires, les mesures douloureuses » ainsi que la « grande épreuve » que leur promet Papandréou, le premier ministre socialiste. Gel des salaires et des pensions, baisse des revenus des fonctionnaires, relèvement (tiens tiens) de l’âge légal de départ en retraite, hausse de la TVA, l’impôt le plus injuste qui soit ; réduction à peau de chagrin des investissements publics, j’en passe et des sévères, dont la hausse, quel scandale !, des taxes sur l’alcool et le tabac, à hauteur de 10% !... Nul doute que la Grèce se prépare des heures lourdes. D’autant que, dans le même temps, aucun effort particulier n’est demandé au patronat, ni même aux banques qui sont pourtant à l’origine de la faillite. Ajoutons que le naufrage grec n’est jamais que le premier d’une longue série en Europe — devraient suivre, dans les mois à venir, le Portugal et l’Espagne —, et on en conclura en un mot comme en mille que pour les instances type Fmi ou banque européenne, la crise n’est jamais que l’occasion inespérée de mettre à bas ce qui reste de droits, de protection sociale et de services publics dans les pays de la vieille Europe. De leur imposer, à tous, la dérégulation sauvage telle qu’elle fut programmée par ces mêmes instances, il y a plus de trente ans. Maintenant le coin est dans la bûche. Il ne peut que s’y enfoncer.

 

     Changeons de focale, tiens, passons de l’infiniment dégueu au tout petit gerbant : Charles Pasqua, une fois de plus, échappe aux plumes et au goudron. Jugé pour moults malversations et autres magouilles bien de chez lui, finalement le mafieux évitera la tôle. On y a cru, un temps, lorsque l’avocat général a requis contre lui quatre ans de prison, dont deux fermes. Jugement, au final : un an avec sursis, ah ah, mais quel matou ce Pasqua ! « Les accusations de corruption ont disparu », pérorait-il au sortir du tribunal, « comment peut-on imaginer que je me sois laissé corrompre ? » Au risque de l’attrister, on l’imagine très aisément. Puis, tel le malfrat de base habitué à ce genre de péripéties, Pasqua, toujours bonhomme, concluait en se marrant « ce n’est qu’une condamnation de plus. » La justice de classe a donc, une nouvelle fois, prouvé son efficacité en protégeant un de ses pairs et en me privant, accessoirement, de la joie de voir l’affreux Charlot tâter du cachot, quelques semaines, ne serait-ce qu’en mémoire d’un certain Malik Oussekine, dont nous sommes plus nombreux qu’on ne croit à nous souvenir encore.

 

     Un autre, qu’on avait par contre et volontairement oublié, c’est le gars Besancenot. Empêtré dans un Npa qui ne décolle pas et se boyscoutise à outrance (faut coller des affiches, les gars !), naviguant à vue, sans projet autre que celui de recruter (faut, les gars, ronéotyper de furieuses affichettes!), le voilà qui se vend, telle une marchandise faisandée, aux socialistes sur lesquels il crachait, avec abondance, il y a quelques semaines encore. « Martine Aubry est la bienvenue à nos côtés », explique celui qui avait fait de l’accord avec le Ps la ligne rouge à ne pas franchir. Depuis, le Npa s’est ramassé gravement lors des élections régionales. Ceci expliquant cela, le voilà donc qui tend ses fesses aux infréquentables d’hier. Belle leçon de realpolitik, qui montre si besoin en était que le Npa n’est jamais qu’un parti comme un autre, ce dont doutaient peut-être les militants de base, ceux qui ronéotypent et collent quoi ? Les affichettes, les gars.

 

     Lui ne s’encombre pas les doigts d’encre, il se répand dans Le Monde, c’est autrement plus classe : Georges Collomb, ci-devant maire de Lyon, n’a pas que des défauts. Par exemple, membre du Ps, il n’aime pas Ségolène Royal : « elle a un côté Madone, Eva Peron ou télévangéliste qui n’est pas trop mon trip. » Son trip, à mon Collomb, ce serait plutôt en toute chose une modération lasse, une manière de Raymonbarrisme tout à fait dormitif : « je suis issu de la classe ouvrière, et je peux vous dire que son rêve n’a jamais été le grand soir », affirme-t-il sans sourciller. « Son rêve, poursuit l’édile, c’est simplement de progresser. » Elle est bien bonne, celle-là, de la pure lyonnaise. Enfin, et comme pour nous achever, Collomb livre sa vision, totalement tripante, de son boulot : « le but ultime de la politique, c’est que les gens voient ce qui a changé dans leur vie à la fin du mandat qu’ils vous ont confié. » Mouais. Et si ce qui a changé c’est : rien ? Alors le but ultime n’a pas été atteint, et on remettra ça pour six ans.

 

     Délaissons pour un temps le guignol lyonnais, et, une fois n’est pas coutume, allons jeter un œil dans les commissariats. Cette semaine à Juvisy (département de l’Essonne), on pouvait y croiser un enfant de trois ans, placé en garde-à-vue en compagnie de son père puis, au bout de vingt minutes, carrément séparé de lui. La presse de caniveau — de celle qu’on trouve dans le métro entre deux affichettes ronéotypées/collées/lues — se contente d’une brève à ce sujet, précise juste que l’enfant était « terrorisé », et que « contacté par l’Afp, le commissariat de Juvisy n’a pas été en mesure de commenter cette information. » Que le commissariat de Juvisy se rassure : elle se passe de tout commentaire.

 

                                                                                                 Fredo Ladrisse.  

(la photo en début de l'article a été prise à Zurich, le 1er mai dernier)

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